Le transcendant est ce qui dépasse radicalement les limites d'un certain être ou ordre d'être, parce qu'il lui est à la fois séparé et supérieur. Par exemple, le divin transcende l'humain, l'infini transcende le fini, la réalité transcende la représentation que l'on s'en fait, etc. Cela signifie qu'il y a entre ces deux ordres d'être une distance infinie, irréductible. C'est le sens du mythe de la tour de Babel : la tour la plus haute ne peut jamais atteindre Dieu à partir de la terre.
Le transcendant est en général l'au-delà inaccessible. Ce qui peut soulever la question de l'existence d'entités métaphysiques, telles que Dieu, l'âme ou le monde. En effet, le métaphysique est ce qui est transcendant par rapport au monde physique qui est le nôtre, ce monde qui est le seul dont nous puissions avoir la connaissance par l'expérience des sens.
Justice et transcendance
Pour que la justice s'exerce de façon à la fois impartiale et incorruptible, on lui demande de transcender les intérêts et les passions des parties dont elle doit trancher le différend. La justice et la loi doivent donc être idéalement transcendantes, relativement au domaine qu'elles doivent juger.
Mais une chose est de transcender un certain niveau d'être, de faire l'effort pour le dépasser, pour être le plus impartial possible, tout en continuant d'appartenir à ce niveau d'être ; autre chose est d'être transcendant, de se trouver de façon incontestable à un niveau d'être supérieur et séparé du précédent.
État et transcendance
Pour cette même raison, la justice est rendue dans le cadre de l'État, institution créée par les êtres humains, mais placée par eux en principe au-dessus de leurs intérêts particuliers, comme un être transcendant. L'État est une personne morale, conçue par l'esprit, distincte des personnes physiques qui représentent l'État et assurent ses fonctions.
Or, en réalité, les fonctions de l'État, sa loi et sa justice sont toujours assurées par des êtres humains, qui ne sont ni parfaits ni infaillibles. Pour cette raison, certains ne voient de justice absolue qu'en Dieu, en adhérant à une foi religieuse.
Est immanent à un être ce qui est compris en lui, dans sa nature, ce que cet être suffit à produire par lui-même, à partir de son seul ordre d'être, sans le secours d'un principe extérieur. Par exemple, la réalité du monde est extérieure, transcendante par rapport à notre conscience qui se le représente. Mais nos représentations sur le monde sont immanentes à notre conscience : ces représentations n'existent que par notre conscience qui peut les modifier à volonté.
Justice et immanence
On parle de justice immanente, dont la loi serait la suivante : un acte injuste entraîne de lui-même sa propre punition, un acte juste entraîne de lui-même sa propre récompense. Sans qu'il soit besoin de faire appel à un principe extérieur, tel que l'institution de la justice, qui viendrait juger cet acte, et le condamner ou le récompenser de l'extérieur.
On peut concevoir cette notion de justice immanente comme étant morale : notre conscience est autonome, elle peut se récompenser et se punir elle-même ; ou bien religieuse, si elle est un acte de foi dans la nature de l'âme et de l'univers, au-delà des apparences relatives à la vie humaine.
Immanence absolue, transcendance relative
On peut soutenir une thèse d'immanence absolue : il n'existerait qu'une seule réalité, un seul ordre de réalité qui suffirait à produire toutes choses, et qu'on pourrait appeler la nature.
Dans ce cas, toute transcendance absolue ne serait alors qu'une fiction, une illusion produite au niveau de notre réalité. Une entité métaphysique telle qu'un Dieu séparé de la nature, du monde physique, ne serait qu'une fiction de notre esprit : un Dieu conçu comme transcendant serait en réalité immanent à l'esprit humain.
Dans le cadre d'une thèse d'immanence absolue, on pourrait encore parler de transcendance, non pas au sens absolu, mais relatif ou modal. Prenons l'exemple de l'État, de sa loi et de son administration de sa justice : ils sont, au fond, immanents aux êtres humains, produits par leur volonté rationnelle, générale ; mais, par leur définition objective, rationnelle, ces institutions de l'État, de la loi et de la justice sont aussi transcendants, relativement aux passions et intérêts de chaque être humain en particulier.
Question :
Faut-il se fier à une justice immanente, ou bien transcendante ?
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